Vous connaissez la boule antistress...
Pour ceux qui ignorent l'existence de ce gadget, je le décris en deux mots : une boule en caoutchouc remplie de petites billes que l'humain énervé est supposé malaxer pour passer ses nerfs... Ce roman est l'équivalent pour les professeurs de Lettres du gadget susnommé...
Je m'explique: Luc Blanvillain dans Crimes et jeans Slim nous narre l'histoire d'un tueur en série de "pouffes" lycéennes. Il ne s'agit pas à proprement parler d'un polar mais d'une description au vitriol de certaines adolescentes qui sévissent dans les établissement scolaires.
L'héroïne, Adélaïde Manchec, mène une double vie... La malheureuse, encombrée d'une famille aimante et cultivée, intéressée par les cours, se doit de cacher cette double tare pour ne pas devenir la tête de Turc des pouffes de sa classe. Elle décide donc de se faire passer pour une des leurs et se procure la tenue complète grâce à la complicité de sa grand-mère: "petits hauts, petit sac, jean slim, ballerines vernies, sautoirs. Au fil des fêtes et des anniversaires, elle avait complété l'équipement : Ipod, portable tactile, appareil photo numérique ultra girly, et puis, encore, des vêtements, des chaussures, des bottes, d'autres chaussures, d'autres sautoirs". Le matin, avant d'aller au lycée, elle passe chez son aïeule et mue : Adieu Adélaïde, bonjour Adé la reine des pouffes, qui prend plaisir à humilier ses camarades et à ruiner le moral de ses enseignants par l'air d'ennui profond qu'elle imprime à son joli minois pendant les heures de cours.
Oui, le trait est forcé mais c'est drôle ! Cette lecture jubilatoire m'a vengée de quelques vexations passées. Je me rappelle d'un cours que j'avais fignolé sur "Demain, dès l'aube..." de ce cher Victor, littéralement saboté par le chagrin d'amour d'une demoiselle. Toute la classe ne se préoccupait que des pleurs de la "pauvre petite chose" et devant mon énervement croissant, une fille m'avait expliqué : "Mais M'dame, XY a cassé par SMS, ça se fait trop pas ! XX est trauma, faut la comprendre..." Que dire devant l'ampleur du drame ! J'ai déroulé sans conviction ma séance jusqu'à la sonnerie en parlant dans le vide puisque tous les esprits étaient accaparés par une peine bien plus profonde que celle éprouvée par Hugo à la mort de sa fille. Le café, à la récré, n'a pas suffi à me remonter le moral !
Pour revenir au récit, la psychose s'empare de la ville... Le commissaire Gicquiaud et son acolyte le lieutenant Bourdin vont tenter d' arrêter le mystérieux tueur qui, non content d'éliminer physiquement des minettes en slim, inonde la population de tracts où il dénonce la dépravation des moeurs actuelles. Bien évidemment, notre couple de pandores ne trouvera pas le coupable, il sera nécessaire qu'Adé, aidé par son petit frère Rod et Thibault, l'intello de la classe mènent une enquête parallèle qui les amènera à un dénouement qui bouscule nos préjugés.
Merci à l'auteur pour ce moment de pur bonheur livresque ! J'ai atteint un degré non négligeable au "gloussomètre" et essuyé quelques larmes de rires durant cette lecture. J'ai appris de source sûre que Luc Blanvillain travaille à deux pas de mon établissement, au lycée de Lannion et qu'il dédicacera cette petite merveille à la librairie Gwalarn le samedi 6 février.
J'y serai !