Même pas peur !
Dans la famille de Dame Armande, les livres circulent beaucoup sauf ceux qui font vraiment
trop peur (ceux que mes deux soeurs se délectent à lire mais qui sont stricty forbidden pour mon petit coeur fragile !). Quand la plus jeune de mes soeurs, la Brestoise au coeur d'airain, m'a proposé ce roman , j'ai émis un cri, genre souris qui s'est coincée une patte dans une tapette , ce qui donnait à peu près ça : "Ouitche, ouitche, pas un peu trop glauque pour moi ?" (Si, les souris lancent cet appel au secours pathétique quand elles se sentent en danger ! Je tiens un enregistrement sonore à la disposition des incrédules. Il a constitué la pièce maîtresse de mon mémoire en souriciologie, obtenu d'ailleurs avec mention très bien. Si vous souhaitez vous procurer un exemplaire de ce travail de recherche, rendez-vous dans n'importe quelle bibliothèque universitaire et demandez : "Ouitche, ouitche, le chant du cygne de la souris", considéré à juste titre comme un classique. )
Trêve d'érudition, le livre de Kylie Fitzpatrick ne génère aucune angoisse chez le lecteur sensible. Ce polar victorien se dévore en un rien de temps. L'héroïne, Sarah O'Reilly, survit tant bien que mal au début de l'histoire. Ses parents sont décédés et du haut de ses treize ou quatorze ans, elle doit veiller sur sa petite soeur Ellen et pour ce faire, se travestir en garçon pour obtenir un travail au London Mercury, un journal qui assure une bonne partie de ses ventes grâce à une chronique sur les meurtres sanglants. Sarah va donc avoir connaissance de deux crimes mystérieux : deux hommes retrouvés le larynx broyé, une méthode employée par les Indiens adorateurs de la déesse Kâli.
L'auteur nous entraîne sur les traces de diamants maléfiques et après les quartiers sordides du Londres du 19ème, elle nous fait voyager jusqu'à Bénarès et les fastes du palais du maharajah. La trame narrative est intéressante, plusieurs personnages nous racontent les faits, les points de vue se complètent et prennent des formes variées, par exemple des lettres, des récits de voyage ou des contes. L'ensemble est parfois un peu convenu (mais peut-être ai-je trop lu de Ann Perry ?) mais distrayant et dépaysant.