Atelier d'écriture de Gwen
Le sujet
Tout d’abord quelques ingrédients :
- la nuit
- une rue sombre
- de hauts talons
- une silhouette furtive
- et la désagréable sensation de n’être pas seul(e)
A partir de ces ingrédients que vous serez libres « d’interpréter » à votre façon, je vous propose d’écrire une histoire (un peu) noire, dévoilant peu à peu l’implacable mécanique du frisson*…
Mon texte
"Eblouie par la nuit..."
La porte d'un immeuble s'ouvrit et une silhouette mince émergea d'une cour sombre. La lueur d'un lampadaire éclaira brièvement deux yeux charbonneux, rimmel coulé et cernes foncées. D'un geste machinal, la jeune femme remonta la fermeture de son blouson et commença à mordiller le zip.
Dans sa tête, les paroles d'une chanson de Zaz « Eblouie par la nuit, à coups de lumière mortelles, à frôler les bagnoles, les yeux comme des têtes d'épingles... ». Elle se dirigea vers la station de métro la plus proche. Ses hauts talons résonnaient dans le noir et ce bruit troublait un peu la tranquillité de la rue plongée dans le silence.Quelle fête ! Elle avait dansé avec frénésie, s'était mêlée aux autres invités, dans le groupe qui s'entassait dans le salon de Pierre. Elle était tellement bien, perdue dans le rythme, fondue dans la foule des danseurs. Elle n'était plus personne, juste une vibration, sans passé, sans présent, sans avenir. Quelle tête elle devait avoir maintenant ! Une mine de papier mâché aurait dit sa grand-mère. « Eblouie par la nuit, à coups de lumières mortelles, à shooter les canettes aussi paumée qu'un navire, si j'ai perdu la tête, je t'ai aimé et même pire... »
Des pas se firent entendre derrière elle. Plongée dans ses pensées, elle n'y prêta pas attention. Combien de verres avait-elle bu ? Impossible de s'en souvenir... Aucune importance, demain elle prendrait une petite pilule miracle et serait « performante » au bureau. L'alcool la plongeait dans un état cotonneux bien confortable depuis qu'il était parti. Elle hâta le pas, pressée soudain de retrouver son lit et de voler quelques heures de sommeil à la nuit.
Avait-elle conscience qu'elle était suivie ? Sa silhouette fragile apparaissait et disparaissait, éclairée ponctuellement par la lumière électrique des lampadaires. Elle entendit siffler dans son dos. Une scène de M. le Maudit traversa son esprit. La bouche de métro n'était plus qu'à quelques mètres. « Eblouie par la nuit, à coups de lumières mortelles, de nos nuits de fumette il ne reste rien que tes cendres au matin, tu es venu en sifflant... »