Paris-Brest de Tanguy Viel

Publié le par Armande



   Oubliez tout de suite la pâtisserie qui ornait autrefois la table des déjeuners dominicaux, le roman de Tanguy Viel ne rappelle en rien ce dessert roboratif ou alors humecté de vitriol...
   Hier, j'ai fait la rencontre de l'auteur à la librairie Gwalarn de Lannion. Il dédicaçait son livre et je souhaitais l'acquérir pour l'offrir à ma soeur cadette qui habite Brest. Dès les premières pages, une coïncidence étonnante a fait de cette lecture un moment particulier.
Le narrateur raconte les repas partagés chaque dimanche, l'année de ses dix-sept ans, avec sa grand-mère.Et les agapes avaient toujours lieu au même endroit : "Le Cercle Marin", que tout Brestois connaît.
"Elle venait là tous les jours, dans cet endroit huppé, croyait-elle,à cause des quinze marches qui menaient au perron, à cause des grands drapeaux français dressés comme des symboles républicains, à cause de la mainmise sur les lieux par les officiers haut gradés, leur marmaille innombrable, leur allure d'échalas sec et droit."
il se trouve que ma soeur travaille à cet endroit depuis huit ans maintenant et que la vision qu'elle en a est très proche de celle de l'auteur.
" (un) cocon (...) où il n'y avait plus à craindre la moindre poussière du dehors, où on se retrouvait entre gens du même monde, avec les mêmes vêtements et les mêmes idées politiques, garantissant à chacun la douceur du prochain, de ce genre de prochain qu'aucun d'entre eux ne peine à aimer comme lui-même, puisque c'est le même."
   L'histoire démarre alors que la grand-mère vient d'hériter dix-huit millions du vénérable Albert et que le père du narrateur peine, lui, à justifier l'évaporation de quatorze millions du club de foot de la ville, dont il est le vice-président.Ses parents doivent s'exiler dans le Languedoc-Roussillon pour fuir l'opprobe mais lui reste, et occupe un petit studio sous le somptueux appartement, front de mer, de l'aïeule. Sa mère y voit l'opportunité de le transformer en "concierge" pour être bien certaine que personne n'approchera de trop près le pactole de sa génitrice.
Le récit fait froid dans le dos, écrit avec une précision presque clinique et impitoyable pour les personnages qui lorgnent tous l'argent de la mamie.La figure centrale de ce roman me semble être la mère, qui m'a rappelé par certains aspects la terrible "Folcoche" d'Hervé Bazin.Le narrateur entretient avec elle une relation complexe, oscillant entre l'obéissance et la fuite. Il optera pour un déménagement à Paris et un éloignement qui le mettra à l'abri de sa fausse tendresse.
" Et se taisant l'un et l'autre, elle a passé sa main sur ma joue, elle m'a caressé la joue, et pour moi c'était comme une lame de rasoir qui m'arrachait la peau."
   Midola, comme moi, a beaucoup apprécié ce roman, incisif et mordant comme le vent dans le Finistère-Nord.



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T
Merci, merci pour l’envoi et la dédicace. Les passages qui décrivent le cercle marin sont vraiment jubilatoires ! Aujourd’hui, j’ai retrouvé mes vieux clients du cercle avec un sourire toujours aussi amusé.
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A
<br /> J'ai pensé que ce livre était fait pour toi !<br /> <br /> <br />
T
A la faveur de la venue de l’auteur chez Dialogues, j’avais déjà lu un article succinct sur ce livre. Mon intérêt avait été un tantinet éveillé mais sans plus… Après ton billet nettement plus développé, je n’ai plus aucun doute : un récit au vitriol + ma ville préférée + une évocation du cercle de la marine, je frétille d’impatience !
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A
<br /> Ne l'achète pas, je l'ai posté hier pour chez toi !!<br /> <br /> <br />
K
Mon swapounet est parti vers sa destinataire ;-) Ouf, j'ai bouclé le tout à temps!
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A
<br /> Bravo !<br /> <br /> <br />
L
Avoir entendu parler de ce roman m'a fait acheter les deux précédents qui sont en poche, mais voilà prise par d'autres lectures... Ton billet me redonne envie !
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A
<br /> je vais me précipiter sur les poches...<br /> <br /> <br />
M
Merci pour le lien ;-) <br /> J'ai découvert Tanguy Viel il y a quelques années avec "L'absolue perfection du crime" que je vous conseille vivement ! "Insoupçonnable" attend patiemment sur mon bureau...
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A
<br /> Tu as été plus rapide que moi. Je n'ai découvert cet auteur que très récemment.<br /> <br /> <br />