La petite cloche au son grêle de Paul Vacca
Merci à Paul Vacca pour ce livre-bonheur, qui m'a fait passer un moment "enchanté". Grande admiratrice de Marcel Proust, je suis ravie de la simplicité avec laquelle l'auteur s'empare de ce"monument" pour l'intégrer à la vie d'une petit bourg , celui de Montigny.
Tout démarre lorsque le narrateur, âgé de presque treize ans, découvre , au bord de la Solène, un exemplaire de "Du côté de chez Swann", oublié dans son jardin par son "idéal" féminin : la chanteuse lyrique Sandra Maréchal. Il s'empare du roman et va le lire peu à peu, chaque soir avec le sentiment de pénétrer ainsi dans l'intimité de la jeune femme.
" Un frisson me parcourt. Ce n'est pas un livre, c'est son livre. Ce ne sont pas que des phrases, ce sont les phrases qu'elle a lues, son regard les a parcourues, sa bouche les a prononcées. Ces lignes pleines et serrées, je ne cherche même pas à en percer le sens. Je sais avec certitude qu'elles renferment ce qui lui plaît. je sens que j'ai sous les yeux la clef qui me permettra, enfin, de pénétrer dans le monde mystérieux des femmes"
La mère de l'adolescent, passionnée de livres, va découvrir avec ravissement que son"petit" lit, et qui plus est, Proust ! Il ne lui en faut pas plus pour être confortée dans l'idée qu'elle a engendré un futur Prix Goncourt. La complicité entre la mère et le fils va se faire encore plus intense autour de la lecture commune de l'oeuvre de Proust . Quand la maladie va frapper celle-ci, le fils et le père n'auront de cesse de magnifier les derniers mois de la femme de leur vie en créant des événements en lien avec l'oeuvre du célèbre écrivain. Ils l'amèneront par exemple à Cabourg, au Grand Hôtel, pour un week-end.
" Papa a bien fait les choses : notre chambre donne sur la mer. Tu te précipites aussitôt sur la terrasse et, une fois le bagagiste parti, tu t'exclames avec une exaltation qui comble d'aise papa:
- C'est magnifique ! C'est exactement comme je l'imaginais : les tableaux d'Elstir, les couleurs changeantes de la mer...
Les yeux mi-clos, tu ouvres tes bras, la tête jetée en arrière, laissant le vent caresser ton visage et tes longs cheveux.
- Même l'air, tiens, je l'imaginais comme ça !"
Nos deux hommes unis contre le mal qui détruit leur amour vont lui offrir aussi un spectacle, où les habitants du village incarneront les personnages les plus célèbres de la Recherche. Pour oublier pendant quelques temps la maladie qui emporte Paola vers l'autre rive , ils "emprunteront" l'oeuvre aux spécialistes , auteurs de mémoires aux titres aussi rébarbatifs que "Mémoire et onomastique comme catalyseur du récit dans la Recherche du temps perdu" et la feront vivre pour voir naître encore un sourire sur le visage de la femme aimée.