Etoile errante de J.M.G.Le Clézio
Pour cette lecture dans le cadre du Blogoclub, j'avais choisi " Etoile errante" pour l'écho qui pouvait se faire avec l'actualité du moment : l'opération militaire "Plomb durci". En effet, l'histoire nous présente les trajectoires à partir de 1943, d'Esther, jeune Juive qui va quitter la France pour le tout nouvel état d'Israël et de Nejma, jeune Palestinienne, chassée de sa terre et contrainte de vivre dans un camp qui de provisoire, devient définitif.
Très rapidement, je me suis rendue compte qu'une entrée historique ou politique ne me permettrait pas de saisir le sens de cette histoire. Le texte est avant tout un poème dédié aux quatre éléments : l'eau, le feu, la terre et l'air. Pour chacun d'entre eux , l'auteur nous en révèle aussi bien les aspects négatifs que positifs.
L'eau, omniprésente dans ce roman, peut ravir les sens de ceux qui l'écoutent comme dans l'incipit : "Elle savait que l'hiver était fini quand elle entendait le bruit de l'eau. L'hiver, la neige avait recouvert le village, les toits des maisons et les prairies étaient blancs. La glace avait fait des stalactites au bout des toits. Puis le soleil se mettait à brûler, la neige fondait et l'eau commençait à couler goutte à goutte de tous les rebords, de toutes les solives, des branches d'arbre, et toutes les gouttes se réunissaient et formaient des ruisselets, les ruisselets allaient jusqu'aux ruisseaux, et l'eau cascadait joyeusement dans toutes les rues du village." Mais cette même eau peut se montrer hostile envers la même Esther quand elle fuit les Allemands à travers la montagne pour rejoindre l'Italie : "A l'aube, la pluie les a réveillées. C'était une pluie fine qui bruissait doucement sur les aiguilles de pin au-dessus d'elles, et se mêlaient au fracas du torrent. Les gouttes commençaient à traverser le toit de leur abri, les gouttes glacées tapotaient leur visage. Elizabeth a bien essayé d'arranger les branches, mais elle n'a réussi qu'à faire pleuvoir plus fort."
Tous ces éléments ambivalents constituent la trame du roman, du moins à mon sens, et cette construction est probablement le reflet du sentiment de J.M.G.Le Clézio sur le conflit israëlo-palestinien : une terre et deux peuples qui se la disputent. Si l'on se place du point de vue d'Esther, cette terre est la leur,selon les textes sacrés .Ce lieu leur est d'autant plus cher qu'à la fin de la seconde guerre mondiale, les rescapés des camps vont y voir un espoir de renaître et de renouer avec une existence normale. En revanche, si l'on épouse, le point de vue de Nejma, spoliée de ses biens et contrainte d'abandonner sa maison et sa ville, les Israëliens ne peuvent apparaître que comme des voleurs de terre.
Une même terre, deux peuples, l'auteur ne tranche pas... Une phrase revient pourtant souvent "Le soleil ne brille-t-il pas pour tous?", prononcée par le vieux Nas, fermier palestinien, quand les soldats sont venus chez lui, pour l'emmener vers le camp.