Le bonhomme de neige de Jo Nesbo

Publié le par Armande


Il s'agit de mon premier polar pour le défi initié par Catherine et je l'ai dévoré en un week-end. La dite fin de semaine était, il est vrai, pluvieuse, et incitait à rester au chaud à lire des histoires qui font peur.

La première neige tombe sur Oslo en novembre 2004 et un mystérieux bonhomme de neige apparaît dans le jardin de la famille Becker. Peu après, la mère de Jonas disparaît et l'écharpe rose que celui-ci lui avait offerte orne le cou de glace du bonhomme de neige.

"La neige du jardin renvoyait assez de lumière pour qu'il puisse distinguer le bonhomme de neige en contrebas. Il avait l'air seul. On aurait dû lui donner un bonnet et une écharpe. Et peut-être un balai à tenir. Au même instant, la lune surgit derrière un nuage. Les dents noires apparurent. Ainsi que les yeux. Jonas inspira machinalement et fit deux pas en arrière. Les yeux de gravier scintillaient faiblement. Et ne se contentaient pas de regarder le mur de la maison. Ils regardaient en l'air. Vers Jonas. Qui tira les rideaux et retourna se blottir dans son lit."

Cette disparition va être confiée à l'inspecteur Harry Hole, une vieille connaissance pour moi, qui le suis depuis sa première enquête. Cet homme fragile, alcoolique difficilement repenti, va découvrir que de nombreuses mères de famille se sont elles aussi mystérieusement "évaporées" ces dernières années lors de l'arrivée des premières neiges. Avec son groupe d'investigation, il va se lancer à la poursuite  d'un tueur en série à l'esprit froid et méthodique, qui jouera au jeu du chat et de la souris avec lui pendant une bonne partie du roman.
 Je ne dirai rien de plus sur l'intrigue, ce serait gâcher une partie du plaisir de la lecture mais je m'arrêterai sur deux aspects qui m'ont particulièrement intéressée: les relations entre le héros et son ex-compagne et la critique acérée du monde des médias.

Harry Hole est séparé de Rakel et souffre de son absence. Elle est partie et espère bientôt oublier Hole et son obsession du Mal à combattre. Leur rencontre au début du roman montre que si la raison lui dit de s'éloigner de cet homme, ses sens la trahissent.

"Elle pensa que Harry avait terriblement maigri, qu'il était rentré en lui-même. Tout comme le souvenir qu'elle avait de lui. C'était presque effrayant de voir la vitesse à laquelle une personne avec qui on avait été particulièrement intime pouvait pâlir et disparaître. Ou c'était peut-être justement pour ça : on avait été si proches que par la suite, quand cela n'est plus, les choses semblaient irréelles, comme un rêve rapidement oublié parce que de toute façon, il n'a eu lieu que dans le crâne d'une personne. C'était peut-être pour cette raison que cela avait été un choc de le revoir. Le prendre dans ses bras, le sentir, entendre sa voix autrement qu'au téléphone, sortant d'une bouche aux lèvres étrangement douces au milieu de ce visage dur et plus ridé que jamais. Regarder dans ces yeux bleus, à l'éclat qui croissait et décroissait en intensité au fil de son récit. Tout comme avant.
Malgré tout, elle était heureuse que ce soit terminé, quelque chose qu'elle avait laissé derrière elle..."

Pendant le récit, ces deux personnages n'auront de cesse de vouloir s'éloigner l'un de l'autre sans pouvoir réellement y parvenir, prisonniers de cet alchimie si particulière des sentiments amoureux.

Jo Nesbo égratigne avec beaucoup de réalisme le monde aussi bien de la presse écrite, à travers le journal "Le Libéral" que les émissions de télévision à sensation où l'on invite des personnalités avec le secret espoir qu'elles vont craquer en direct ou susciter l'événement d'une manière ou d'une autre pour doper l'audimat. Harry Hole va se servir d'une de ces émissions pour les besoins de l'enquête et révéler à la fin de celle-ci que le véritable auteur des crimes n'a pas été, comme l'opinion l'imagine, arrêter par la police. Le présentateur saisit en une fraction de seconde qu'il tient un scoop...

"Je n'ai jamais dit que Vetlesen était le Bonhomme de neige, poursuivit Hole. Au contraire, tout indique que le Bonhomme de neige court toujours.
Bosse laissa échapper un petit rire. C'était le rire dont il faisait usage pour atténuer la tentative ratée d'un invité qui avait essayé d'être drôle.
-J'espère pour le sommeil de mon épouse que vous plaisantez, répondit Bosse avec espièglerie.
- Non. je ne plaisante pas.
Oda regarda l'heure et sut que le responsable d'enregistrement faisait maintenant des bonds derrière la caméra, en se passant une main bien à plat sur la gorge pour montrer à Bosse qu'ils dépassaient l'heure prévue, que la chanson devait démarrer s'ils voulaient que le premier refrain passe avant le générique. mais Bosse était le meilleur. Il savait que ça, c'était plus important que tous les singles au monde. Il ignora donc le métronome et se pencha complètement dans son fauteuil pour montrer à ceux qui en auraient éventuellement douté ce que c'était. Le scoop. La révélation publique essentielle. Ici, dans son, dans leur émission."

Au final, "Le Bonhomme de neige" est un roman policier à la trame assez classique mais bien construit et avec un atout de taille : des personnages qui ne sont pas des archétypes de série noire mais des êtres humains dans toute leur passionnante complexité.

Publié dans romans policiers

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P
Je retiens que ce polar se déroule dans le milieu de la presse et des médias, ce qui est un atout pour moi qui me passionne pour ce secteur depuis ma période étudiant. Je n'adhère pas trop aux histoires de serial killers mais cette histoire de bonhomme de neige m'intrigue vraiment !<br /> ;-)
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A
<br /> Je n'aime pas non plus les histoires de serial killers ! Mais l'intrigue de Jo Nesbo ne repose pas que sur cet aspect.<br /> <br /> <br />
K
"Les cafards" ;-)
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A
<br /> J'ai cherché dans mes cartons (et oui, j'ai déménagé en août mais les livres dorment toujours dans le grenier, en attendant que je leur retrouve une place dans la maison) et je n'ai pas réussi à<br /> mettre la main sur celui-là.<br /> <br /> <br />
K
J'ai déjà lu "L'homme chauve-souris", c'est le deuxième qui me manque!
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A
<br /> Rappelle-moi le titre du deuxième...<br /> <br /> <br />
K
Attends, le bonhomme de neige, ce n'est pas le premier !<br /> Je n'ai pas de cave, je lis très vite, je me fais peur parfois (et en plus je vais déposer des commentaires et lire des articles, et je bosse par ailleurs - copies corrigées, cours préparés ; demain réunion avec les parents, ça va me calmer- et je garde des liens amicaux et familiaux)
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K
Mais c'est ce que j'ai fait!!! Seulement, je n'ai pas trouvé le second opus ;-)
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