La tombe de Zeus
Je viens de passer un excellent après-midi en compagnie de Barbara Cleverly et de sa nouvelle héroïne, Laetitia Talbot. Je connaissais déjà l'auteur pour avoir suivi son personnage, Joe Sandiland, dans ses enquêtes en Inde. C'est bien écrit, d'une plume peut-être un brin désuète (mais je l'avoue cela ajoute au charme de la lecture).
L'histoire démarre à Héraklion, en Crète, en mars 1928 mais plonge ses racines dans un sanglant massacre perpétré en 1898. Notre héroïne, jeune fille de bonne famille, dotée d'un père richissime, doit mener un chantier de fouilles. Que les fouilles soient financées par son père laissse imaginer une demoiselle assez gâtée et arrogante. Le lecteur découvre plutôt une suffragette en herbe à l'esprit vif et à la réplique acérée.Elle est accueillie par Théodore Russell, archéologue amateur. Dans la maison de celui-ci règne une ambiance lourde et le "suicide" de Phoebe,son épouse, ne va pas alléger l'atmosphère.
Le charme du roman ne réside pas dans l'intrigue policière ni dans l'histoire d'amour entre Laetitia et Gunning, l'architecte , toutes les deux très prévisibles . Il émane de la description de la Crète et de l'art que possède B.Cleverley de mêler le présent des personnages et les mythes anciens.Passé et présent, profane et sacré se mélangent avec bonheur.
J'aime particulièrement ce passage qui illlustre bien le style de l'auteur. Laetitia Talbot pense être sur le point de mettre au jour le tombeau de Zeus:
"- Eh bien... Salut, ô Roi des Dieux ! Si vous êtes là-dedans, mon vieux, je vous préviens: vous n'allez pas tarder à revoir la lumière du jour. Mais, je vous connais, et je vous demande de ne pas vous énerver. Inutile de nous envoyer vos éclairs ou vos tremblements de terrre, d'accord ?
Elle ravala sa salive en entendant soudain ses paroles, dangereusement désinvoltes. Crime de lèse-majesté ! L es dieux ne prenaient pas ce genre d'affront à la légère... Elle prenait le risque de se retrouver transformée en laurier, ou pire: quelque chose de petit et de dégoûtant. (...)
Elle se mit à courir jusqu'au panier et à fouiller dedans jusqu'à trouver ce qu'elle cherchait. Puis elle revint devant l'abri et s'immobilisa, maladroite.
Il fallait à tout prix réciter une incantation. Son esprit se heurta au mot "prière", le rejeta et choisit finalement "sentiment". Incapable de trouver une formule adaptée, elle exhuma des failles de sa mémoire une traduction datant de ses années d'école. Les derniers vers de Médée.
"O Zeus tout puissant, roi de l'Olympe !
Maître des destinées humaines !
Ce qu'espèrent les mortels rarement se produit
Car les dieux ne connaissent qu'un don: l'inattendu."
-Je vous salue, euh... monsieur. Veuillez accepter cette modeste offrande. C'est tout ce que j'ai pu trouver mais peut-être sera-t-elle la bienvenue, après toutes ces années.
Elle trouva une fissure dans les rochers juste devant l'abri et tendit les mains au dessus. De la gauche, elle versa le fond d'une bouteille d'Arkhanais et, de la droite, retourna un flacon de miel et attendit que les dernières gouttes glissent dans l'interstice. Une libation."
L'histoire démarre à Héraklion, en Crète, en mars 1928 mais plonge ses racines dans un sanglant massacre perpétré en 1898. Notre héroïne, jeune fille de bonne famille, dotée d'un père richissime, doit mener un chantier de fouilles. Que les fouilles soient financées par son père laissse imaginer une demoiselle assez gâtée et arrogante. Le lecteur découvre plutôt une suffragette en herbe à l'esprit vif et à la réplique acérée.Elle est accueillie par Théodore Russell, archéologue amateur. Dans la maison de celui-ci règne une ambiance lourde et le "suicide" de Phoebe,son épouse, ne va pas alléger l'atmosphère.
Le charme du roman ne réside pas dans l'intrigue policière ni dans l'histoire d'amour entre Laetitia et Gunning, l'architecte , toutes les deux très prévisibles . Il émane de la description de la Crète et de l'art que possède B.Cleverley de mêler le présent des personnages et les mythes anciens.Passé et présent, profane et sacré se mélangent avec bonheur.
J'aime particulièrement ce passage qui illlustre bien le style de l'auteur. Laetitia Talbot pense être sur le point de mettre au jour le tombeau de Zeus:
"- Eh bien... Salut, ô Roi des Dieux ! Si vous êtes là-dedans, mon vieux, je vous préviens: vous n'allez pas tarder à revoir la lumière du jour. Mais, je vous connais, et je vous demande de ne pas vous énerver. Inutile de nous envoyer vos éclairs ou vos tremblements de terrre, d'accord ?
Elle ravala sa salive en entendant soudain ses paroles, dangereusement désinvoltes. Crime de lèse-majesté ! L es dieux ne prenaient pas ce genre d'affront à la légère... Elle prenait le risque de se retrouver transformée en laurier, ou pire: quelque chose de petit et de dégoûtant. (...)
Elle se mit à courir jusqu'au panier et à fouiller dedans jusqu'à trouver ce qu'elle cherchait. Puis elle revint devant l'abri et s'immobilisa, maladroite.
Il fallait à tout prix réciter une incantation. Son esprit se heurta au mot "prière", le rejeta et choisit finalement "sentiment". Incapable de trouver une formule adaptée, elle exhuma des failles de sa mémoire une traduction datant de ses années d'école. Les derniers vers de Médée.
"O Zeus tout puissant, roi de l'Olympe !
Maître des destinées humaines !
Ce qu'espèrent les mortels rarement se produit
Car les dieux ne connaissent qu'un don: l'inattendu."
-Je vous salue, euh... monsieur. Veuillez accepter cette modeste offrande. C'est tout ce que j'ai pu trouver mais peut-être sera-t-elle la bienvenue, après toutes ces années.
Elle trouva une fissure dans les rochers juste devant l'abri et tendit les mains au dessus. De la gauche, elle versa le fond d'une bouteille d'Arkhanais et, de la droite, retourna un flacon de miel et attendit que les dernières gouttes glissent dans l'interstice. Une libation."